Après ce petit voyage ô combien rentable en fer, mais à la compagnie extrêmement pénible, j'avais estimé opportun de rentrer à la capitale et d'écourter notre séjour dans la forêt du grand noyé. Cette petite escapade avait également été riche en enseignements. Désormais, j'étais capable de faire bien plus que lancer des boules de feu, je pouvais également lancer des sortilèges de sommeil. C'était de manière parfaitement fortuite que je l'avais découvert, et je n'eus guère de difficulté à imaginer comment rendre cette nouvelle compétence utile au combat. Il ne me restait plus qu'à réitérer l'exploit et à tester ça en situation réelle.

Rowan s'était un peu dévoilé, également. Si le mioche ignorait d'où il provenait - sans doute était-il trop jeune pour différencier les paysages -, j'avais quand même réussit à lui faire cracher le fait qu'il avait été de la volonté de ses parents de l'abandonner un beau matin. Quand je resongeais à la raison qu'il m'eut donné, je ne pouvais pas faire le fier, et quelque part, sans vouloir l'admettre, je m'y attachais déjà. Lui et moi avions des points communs, et notamment sur les relations familiales compliquées. En quelque sorte, je comprenais beaucoup mieux pourquoi Rufus et Dahn l'avaient pris sous leur aile, et pire, me l'avait collé dans les pattes également. Peut-être avaient-ils pensé que nos expériences, assez similaires, pouvaient nous rapprocher, mais allez savoir à qui de nous deux cela ferait le plus de bien.

Je déchargeais le fer dans la boutique de Rufus après avoir poussé Rowan à l'intérieur. Le pauvre gosse était transis de froid.

- Y'a personne ..., m'annonça-t-il sur le pas de la porte quelques minutes après être entré, penaud.

C'était assez curieux. Que Dahn soit absent, c'était plausible, après tout, il avait son propre foyer et sa boutique, mais que Rufus abandonne la sienne, c'était autre chose. J'espérais sincèrement qu'il n'avait pas de nouveaux ennuis en ayant trop joué aux cartes. Soupirant, je fis une pause pour installer le gamin à l'intérieur, et lui servir une assiette de gruau bien chaud avant de reprendre mon travail.
J'étais plutôt content de moi, j'avais rempli la charrette quasiment à ras bord, et pour le coup, si Rufus trouvait que ces minerais avaient de la valeur - je l'espérais de tout cœur -, il allait avoir un sacré stock de départ à écouler. Dans le cas contraire, si je m'étais lourdement trompé et qu'il ne s'agissait pas le moins du monde de fer, en plus de passer pour un imbécile, j'avais une cargaison de gros cailloux inutiles dont je ne savais que faire.

Je mis deux belles heures si pas plus à tout décharger, et quand j'eus fini et que je passais le pas la porte de la boutique pour moi aussi me sustenter, je découvris un Rowan parfaitement épuisé, roulé en boule dans un fauteuil, déjà endormi. Je ne les portais pas vraiment dans mon cœur, mais je devais avouer que parfois, les enfants pouvaient se montrer terriblement adorables. Surtout quand leurs batteries étaient déchargées ...

Claquant mes doigts, je générais une boule de feu moyenne qui alla enflammer les bûches dans la cheminée. Un peu de chaleur ferait du bien dans cette pièce, maintenant que le soleil était couché. Mais en attendant que le feu ronflant nous réchauffe, je me mis en quête d'une couverture que je pourrais déposer sur Rowan. Je fouillais armoires et étagères, et c'est en ouvrant un grand tiroir que je découvris non pas des laines, mais une enveloppe à mon nom. Intrigué, je la tenais entre mes mains. Ce n'était ni l'écriture de Rufus, ni celle de Dahn, et pourtant, je pouvais parfaitement distinguer les lettres qui composaient mon prénom. J'hésitais longuement à l'ouvrir pour en connaître le contenu, mais connaissant mes amis, s'ils avaient pris soin de cacher cette missive loin de mon regard, c'est qu'il y avait une raison. Et en même temps, rien que de le savoir éveillait ma curiosité à un niveau supérieur.

En entendant la porte arrière s'ouvrir pour laisser passer les deux larrons qui s'en rentraient, je pris la décision la plus stupide qui soit : je fourrais dans ma poche la lettre, refermais vivement le tiroir et ouvris à la volée l'étagère supérieure où je dégottais finalement une couverture de laine épaisse que je déployais rapidement sur Rowan.

« Bonsoir, vous deux ! » scandais-je joyeusement en voyant Rufus et Dahn débarquer dans la pièce.

- Vous êtes déjà rentrés ? me demanda Rufus.

« Il y a quelques heures, oui. Tu n'as pas vu tout le stock que je t'ai ramené en entrant ? J'savais pas trop si c'était véritablement du fer, ni même si tu vas pouvoir faire ton beurre avec, mais je t'en ai miné tout plein. »

Il fit demi-tour aussitôt, et alla vérifier la cargaison. Quand nous entendîmes une puissante exclamation de surprise, puis de joie intense, je compris que je ne m'étais pas trompé.

« Parfait ! Bien, je vous laisse pour ce soir, je vais aller m'enivrer d'alcool et de femmes pour la nuit. Je vous laisse Rowan, je pars à l'aube pour chasser quelques bêtes dans la forêt d'Istralis. »

- Il a été sage ? questionna Dahn.

Je le toisais longuement, me demandant si cela valait encore la peine de lui faire la tête ou non, puis, dans un soupir, j'en décidais que non, nous pouvions de nouveau nous parler normalement.

« Il n'a rien dit ou fait qu'un gamin de son âge n'aurait fait », rétorquais-je dans un clin d'œil. « Dis à Rufus que je reviendrai d'ici quelques semaines. Ou pas, à voir si ces saletés ne m'ont pas avant ... »

- Besoin d'un coup de main ?

Je ris aux éclats.

« Je pense qu'une certaine maître enchanteresse a plus ou moins établi que ton aide était superflue, inutile et non désirée », je me frottais la nuque, « rassure-toi, c'est mieux ainsi », ajoutais-je précipitamment en voyant sa mine déconfite, craignant sans doute que je lui en veuille encore d'avoir sagement obéi à l'ordre de cette femme comme un bon toutou, « autant laisser aux Élus les boulots d'Élus. Salut ! »

Je poussais alors la porte de la boutique dans un signe de la main, me retrouvant très vite dans la ruelle animée de la capitale, oubliant tout de cette lettre qui gisant dans ma poche, et oubliant tout de cette semaine passée dans la forêt du grand noyé dans les bras soyeux, maigres et tendres d'une jolie blonde.

Je ne dormis pas cette nuit-là. Peu importait la beauté qui rêvait sur moi, toute blottie dans mes bras, je ne parvenais pas à me retrouver au pays des songes, quoi que je pusse faire. Alors, quand je vis à travers les volets du bordel où j'avais payé ma nuit, les premières lueurs du jour, je me glissais hors du lit et rassemblais mes affaires pour quitter la capitale, tel que je l'avais décidé.

A l'aube, alors que Arswalt s'éveillait doucement, je errais dans les rues, me dirigeant vers la sortie Est. Je m'étais décidé, finalement, à aller dans la forêt d'Istralis. Il était inutile de me demander pourquoi, moi-même je l'ignorais. Fatigué et baillant, je fus pour le moins soulagé de découvrir une carriole, prête à démarrer. Moyennant une petite pièce d'or, je payais ma place parmi les chasseurs qui s'en allaient au même endroit que moi. Beaucoup trop comateux de mon état, je ne leur adressa pas la parole de tout le trajet, et quand bien même ils auraient voulu faire la causette avec moi, je n'entendis absolument rien à leurs conversations.

Tout ce que je sus, c'est que nous ne fîmes pas de pause. Il fallait croire que les chasseurs avaient grand hâte d'arriver à bon port, et ce, avant la tombée de la nuit. Ce qui m'arrangeait, à dire vrai. Quand la carriole s'arrêta, je suivis d'un seul corps la bande, et mis pied à terre, balançant mon sac sur l'épaule. Cependant, là où les chasseurs s'enfonçaient directement dans Istralis par le nord, je préférais bifurquer légèrement vers l'ouest, et ainsi progresser de mon côté. J'avais besoin d'un peu de tranquillité, et quelque chose me disait qu'ils n'allaient pas vraiment apprécier que je les suive davantage - à leurs yeux, je devais être un énergumène bien louche.

Je marchais longuement, sans trop savoir où j'allais, ni ne pris la peine de m'orienter pour savoir comment sortir de là, par la suite. La nuit blanche m'avait exténué et tué le peu de jugeotte qu'il me restait. Après tout, je revenais à peine de voyage, que je repartais à nouveau sans prendre le temps de me reposer, ni même de passer quelques nuits dans le confort d'un bon lit moelleux et tiède. Il fallait croire que j'avais davantage besoin de solitude et de calme que de luxe ou de plaisante compagnie. Pour une fois.
Je me trouvais un petit coin que j'estimais approprié et y jetais mon sac, avant de m'asseoir tranquillement contre un arbre. Le soleil n'allait pas tarder à se coucher, aussi, je me blottis du mieux que je pus avant de me générer une boule de feu qui allait embraser un bon brasier pour la nuit.

C'est en cherchant après mes précieuses que je retombais sur cette fameuse lettre, trouvée la veille, dans un tiroir de Rufus. Comme je l'avais déjà remarqué, l'écriture n'était ni la sienne, ni celle de Dahn. Mais maintenant que j'avais tout le loisir d'observer cette calligraphie élaborée et particulièrement soignée, je pouvais confirmer ce que je savais déjà. Ce que je n'avais pas reconnu précédemment, en revanche, c'était ladite écriture, car assurément, maintenant que je la voyais, je n'avais plus aucun doute sur le destinateur.

Lucia.

Tellement de questions m'assaillirent, à un point où, même assis, j'en avais des vertiges. Pourquoi ? Quand ? Comment ?
Pourquoi m'écrivait-elle ? Comment m'avait-elle retrouvée et comment connaissait-elle l'adresse où la faire parvenir ? Depuis combien de temps Rufus détenait ce message ? Et enfin, que contenait cette note ?
Mes doigts se mirent à trembler sous le papier, d'un empressement juvénile que je dus réfréner. Très naïvement, je me surpris à avoir des idées absurdes, l'imaginant me supplier de la reprendre alors que je la savais pertinemment mariée à l'heure qu'il était. Je chassais immédiatement ces pensées qui ne me faisaient que du mal. Non, c'était forcément autre chose. Peut-être avait-elle entendu parler de mes mésaventures avec la justice, et qu'à présent, elle me menaçait d'une quelconque façon ? Non, non. Absurde encore une fois, elle n'avait aucune raison de me faire du chantage, elle avait obtenu tout ce qu'elle voulait. Qu'était-ce alors ? Une lettre d'amour ? Une lettre d'excuse ? Une lettre d'adieu ? Un faire-part de naissance ? Une annonce funèbre ? Il m'aurait été si simple de l'ouvrir, et d'en lire le contenu pour être fixé mais mes doigts se refusaient pourtant à m'obéir. Figés, ils ne pouvaient tout simplement pas s'absoudre à ouvrir l'enveloppe et déplier la missive.

Mes pensées s'égaraient, tandis que mon regard se perdait dans le vague et dans la contemplation des flammes dansantes devant moi. Allais-je seulement aimer ce que j'allais lire ? Moi qui, jusqu'ici, avait tout fait pour l'oublier, tout fait pour l'effacer de ma mémoire, tout fait pour passer à autre chose, tout fait pour trouver également ma part de bonheur alors même que je savais la chose impossible. Je n'étais pas encore entièrement remis d'elle, malgré tous mes efforts, et lire ses mots allaient peut-être me faire reculer, et me replonger dans la souffrance avec laquelle j'avais fini par apprécier la compagnie. Ma raison me hurlait de la jeter prestement au feu, d'oublier avoir eu connaissance de l'existence de cette lettre et de pouvoir enfin véritablement passer à autre chose. Mais là encore, mes doigts s'y refusaient. Mon cœur, lui, battant à tout rompre, se raccrochait - peut-être vainement - à un fol espoir. L'espoir de voir mon exil être terminé. L'espoir de retrouver les jours heureux que j'avais perdu. L'espoir d'avoir une seconde chance avec elle. Même si ma tête, chaque jour, me persuadait que je trouverai un jour mieux, celle pour qui j'étais destiné, mon âme, elle, me hurlait que celle de Lucia était sa sœur, et que pour le meilleur ou le pire, nous étions faits l'un pour l'autre.

« Fait chier ... », pestais-je en froissant le papier et le réduisant à l'état de boulette avant de l'enfoncer dans les profondeurs de ma poche.

C'est exactement à ce moment précis que j'entendis un croassement lugubre, et quelques battements d'ailes au-dessus de ma tête. J'avais suffisamment vu, et combattu ces saloperies pour ne pas reconnaître la présence de dravens dans le secteur ... Me dressant d'un bon, je dégaina mon sceptre et le brandit devant moi, récupérant une boule de feu au creux de ma main pour m'éclairer si jamais je venais à m'éloigner de mon bivouac.

Deux de ces viles créatures se posèrent à quelques mètres, et sans attendre, je lui projetais la boule de feu que j'avais dans la main. Elle fila à toute allure, finissant sa course contre son poitrail, carbonisant plumes et peau dans un cri glauque de douleur.

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Le membre 'Iain' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

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'Combat (facile)' :

Évidemment, le second draven n'attendit pas que je me retourne sur lui pour s'en prendre à moi. Pendant que je regardais, non sans une très grande satisfaction, son congénère flamber de mes flammes, il me griffa le dos de ses pattes acérées.

« BORDEL !! Pas encore !!! » m'écriais-je, ne me rappelant que trop bien la douleur que j'avais déjà ressentie avec ce maudit cerbère sur le dos, dans les campagnes arswaltiennes.

Malgré un sort d'apaisement d'Amorine, mes lacérations n'étaient pas encore tout à fait guéries, et le draven en rouvrit certaines ...
D'une colère que j'estimais parfaitement justifiée, je fis volte-face, sceptre en main et balaya la zone avec, d'un mouvement circulaire. Je le touchais, mais le manque de précision n'apporta pas grands dégâts. Je le blessais, très certainement, mais je ne fis que lui arracher quelques plumes au passage.
C'était davantage une contre-attaque instinctive, lancée sous la douleur.

Je pouvais sentir mon dos s'humidifier du sang qui suintaient de mes blessures, et mon bras se fit tremblant. Nous nous faisions face, yeux jaunes contre yeux verts, nous toisant, nous jaugeant. J'ignorais si ces créatures étaient dotées d'une intelligence, mais dans tous les cas, il semblait attendre avant d'agir. Comme s'il réfléchissait au meilleur moyen de m'atteindre.

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