TON HISTOIRE

Éloïse Mereween est la dernière née d'une fratrie de trois enfants. Son père, ancien membre de la garde est devenu bûcheron dans un petit village limitrophe à la forêt du grand noyé dans la campagne Hyvrissienne. Sa mère s'occupe de la maison et d'un petit jardin pour subvenir aux besoins de la famille.

Quelque chose te tracasse ma chérie ? Si tu continues à te mordiller la lèvre tu vas finir par te faire mal.
La voix de maman étais douce et légère, mais je sens au fond de moi une pointe d'inquiétude dans son ton. Sa façon de me regarder me fait céder et je décide de lui parler de l'arbre de mon rêve
La façon dont son expression changea, ne fût-ce que pour un instant, me convainquit de ne plus jamais en parler.

La saison froide approchait à grands pas et pour la petite famille comme pour le village, les nombreux marchands venant troqué le bois et autre denrée contre des vêtements, sucrerie et autre produits venant des différentes contrées. Sa mère avait préparé un pique-nique et s'apprêtait à rejoindre son époux avec ses trois enfants. La journée était assez belle: le ciel bleu s'ourlait de quelques nuages cotonneux et une brise légère rendait la température juste assez fraîche pour être agréable.

En fermant les yeux, j'arrive encore à percevoir l'odeur discrète des arbres, la caresse du vent, le doux parfum des fleurs tardives, la chaleur de la main de maman, mon frère sautillant après un papillon, ma sœur gambadant tout en chantant une chansonnette et le sourire de papa me prenant dans ses bras.

Elle venait d'avoir cinq ans l'été passé et ce sont les derniers souvenir de sa famille. Ce qui s'est exactement passé, elle l'a oublié. Et les visages, eux, l'ont quittés depuis longtemps.

Les mots de maman résonnais autant que le fracas de la hache de papa. Elle nous hurla de courir sans jamais nous retourner jusqu'au village. J'entendis des cris et des hurlements, des râles et des grognements. Mon frère me poussa dans un buisson de ronce où je restais là, pétrifiée, sans bouger, me mordant la main jusqu'au sang afin de ne pas hurler tandis qu'un liquide poisseux coulait le long de ma joue alors que je pouvais entendre des bruits de mastications non loin.

Plus d'une journée fut nécessaire pour que la fillette encore tremblotante de peur daigne sortir de ce buisson. Égarée, blessée, elle ne retrouvât jamais son village natale et commençât une longue errance dans la forêt, parsemée de journées de jeûne et d'épuisement, elle se nourrissait d'herbes et de rares cadavres comestibles. Si elle réussit à survivre, elle ne le dût qu'aux bribes d'enseignement de sa mère dans sa tendre enfance.

Deux hommes en en patrouille me surprirent en train de dormir et me ramenèrent de l'autre côté du mur, affolée, hurlante de peur, donnant des coups de pieds et de poings, mordant toute main s'approchant de trop près, ne me calmant que lorsqu'ils me rapportèrent à manger.

Elle fut confiée peu de temps plus tard à un orphelinat pour jeune fille où elle apprit à lire et à écrire. Ses cheveux avaient blanchis depuis et c'est ainsi que le terme de sorcière vint naturellement aux lèvres des plus jeunes, terme bientôt repris par tout l'orphelinat, ainsi elle fut rapidement harcelée par les autres pensionnaires.

Mais qu'est-ce que tu me chantes la ? Pourquoi ne peut-on plus jouer ensemble ? Je me fiche des autres c'est avec toi que je veux jouer !
J'avais honte et j'avais beau fixer le sol je savais pertinemment que mon amie me dévisageait. Obstiné elle continua désespérément à essayer de me faire changer d'avis. Au fond de moi je savais ce qu'elle ressentait. Je faisais ça pour elle pour la protéger, la seule amie que j'ai eu, la seule qui m'avait accepté.

Le temps passa et petit à petit, elle devint la plus vieille pensionnaire de l'orphelinat. Aucun maître ne voulait la prendre en apprentissage et allant sur ses dix-sept ans, elle serait vendue comme esclave afin de rembourser le pensionnat.

Ces derniers temps l'arbre me rendait visite chaque nuit. Mes rêves d'enfance se faisaient plus net, plus précis. Il semblait m'appeler me demandant son aide, mais je ne comprenais pas leurs significations jusqu'au dit jour fatidique. Tel un miracle, mon salut arrivât en la présence d'un Initiateur venant frapper à la porte.