Peut-être aurait-ce était plus judicieux d'aller dans les montagnes célestes, après tout Mélaskholès commençait à bien les connaître. Comme il savait où trouver du cuivre c'était tout de même un moyen assez efficace de se procurer un peu d'or assez facilement. Mais il était bien connu que l'acolyte n'avait pas l'esprit suffisamment pragmatique pour cela.
Il portait une affection toute particulière pour son arme depuis le jour où celui-ci lui avait révélait ses pouvoirs. Il avait cependant vu en boutique des spécimens bien plus impressionnants. Dès lors, il s'était mis en tête l'idée de s'en procurer un semblable. Il se voyait déjà équipé d'une telle arme. Il en éprouvait d'ores et déjà une fierté certaine. Alors, il ne lui fallait pas perdre davantage de temps. Néanmoins les prix en boutique l'avait plutôt refroidi mais cela ne le surprit que très peu. Une telle beauté n'était pas donné. C'est donc la raison pour laquelle il avait changé ses habitudes et se trouvait dans la forêt d'Istralis.

Les lieux avaient l'avantage de préserver la fraicheur et de ne pas accabler les voyageurs de ses journées étouffantes. Malgré tout, Mélaskholès ne parvenait pas à s'en satisfaire. Comment pouvait-il lancer son bâton sans prendre le risque de le perdre définitivement dans les branchages ? C'était là une excellente question, existentielle qui plus est et qui le préoccupait comme souvent lorsqu'il ne parvenait pas à trouver de réponse. Ce qui était une chose récurrente.
Voilà de quoi l'accabler d'une peine inconsolable. Il trainait davantage les pieds qu'il ne marchait et manquait de tomber à chacun de ses pas. Il y avait une raison toute simple à cela, c'est qu'il marchait en fixant la cime des arbres d'un regard accusateur. Après tout, c'était de leur faute si l'acolyte était si malheureux. Ainsi, il se prenait les pieds dans les racines et trébuchait. Cela ne semblait pas le perturber pour autant. Son esprit était bien trop préoccupé pour porter la moindre attention à ces choses futiles.
Il y avait des priorités, Mélaskholès les connaissait tout à fait.

Sa décision fut prise, il allait se priver d'un tel plaisir pour ne pas se retrouver sans arme dans cette forêt. Cette décision lumineuse chassa ses sombres pensées. C'est qu'il lui arrivait d'avoir des idées qu'on pouvait en toute sincérité qualifier de géniales. Son humeur changea alors du tout au tout. Il se mit à sautiller tout en marchant tant sa joie était palpable.
A aucun moment il ne se préoccupa des bruits qui l'entouraient. L'obscurité de la forêt pouvait dissimuler bien des choses inquiétantes mais le jeune homme était totalement inconscient du danger. Grand bien lui fasse, l'insouciance permettait à bien des hommes de vivre heureux. Mais très vite l'homme heureux qu'il était jusqu'alors plongea doucement dans un état mélancolique. Il tenait son arme dans la main et se sentait frustré de ne pas pouvoir le lancer. Il avait bien réussi à repousser cette idée, mais celle-ci était bien plus tenace qu'il ne l'avait pensé.

Une nouvelle décision fut prise. A quoi bon vivre si c'était pour vivre malheureux ? Peut-être était-ce une chose curieuse, mais Mélaskholès!s appréciait être heureux. D'autant plus que lorsqu'il se sentait heureux, il était content. C'est un fait qu'il avait constaté il y a bien longtemps. Peut-être était-ce la veille. En même temps sa grande sagesse ne datait pas d'aujourd'hui puisqu'elle datait exactement de la veille.
Encouragé par ce modeste sentiment de maturité authentique, il s'arrêta et se prépara pour la grande et folle aventure qui l'attendait.

Il jugea les branchages et estima qu'il avait peu de chance de perdre son arme. Il fit tournoyer son bâton avec habilité et le lança. Fendant les airs, il émit un sifflement jusqu'au moment où il disparut entre les feuilles. Mélaskholès leva les bras et se mit à tourner en rond pour réceptionner son bien. Très rapidement, au bout d'une minute ou deux il comprit que l'arme était coincé dans l'arbre.
Il le chercha désespérément, mais il était difficilement de retrouver dans un arbre une arme constituée d'un bois identique.
Pris de panique, il fonça vers un arbre au tronc épais et le secoua de toutes ses forces. Mais le tronc était massif et ne bougeait pas d'un poil. Malgré cela Mélaskholès garda espoir et redoubla d'effort, convaincu qu'il parviendrait à récupérer son précieux bâton de cette façon.

Ma pseudo initiation venait de finir, et j'avais pu récupérer certains objets et artefact dont je ne connaissais pas encore l'utilité. Mais j'allais y réfléchir bien plus tard car pour l'heure j'avais pensé à faire bien d'autres objectifs. Comme je l'essayais depuis le début, il fallait que je gagne de l'argent, et que je m'entraine. Car si l'étrange inconnu disait vrai, j'avais un pouvoir en moi, soit disant. Je n'y croyais pas vraiment, mais je ne pouvais nier que j'avais senti une puissance ressurgir du plus profond de mon être.

Certes en tant que femme d'officier, mon mari m'avait apprit à me défendre et me battre, mais ce que j'avais ressenti il y a quelques jours, était encore autre chose, un fait inexplicable. Alors quel meilleur moyen de vérifier cette hypothèse en s'entrainant et en se battant. Une prise de risques calculée en d'autres termes. Et quel meilleur lieu qu'une forêt peuplé d'animaux et surtout de brigands et autres mercenaires. Des humains qui ne manqueraient à personne s'ils disparaissaient, et dans le meilleur des cas, je savais que ces scélérats avaient souvent des informations fortes utiles et intéressantes. Peut être pourrais-je en apprendre plus sur les esclavagistes et mon ennemi juré.

Je ne me souvenais pas depuis combien de temps, je m'étais isolée dans la dites forêt, mais je vivais comme je le pouvais et au fil du temps, j'en prenais l'habitude et même l’expérience. Je commençais même à parvenir à pister quelqu'un et à me rendre aussi silencieuse qu'un prédateur de la forêt. D'ailleurs je m'en inspirais même au cours de mes observations.

Et cette journée ne faisait pas exception, du moins c'est ce que je pensais. Car mes sens plus affutées que jamais me permirent d'entendre non loin de là un étranger. Et tel un animal, je me faufilais en discrétion dans les broussailles, attendant ma possible proie ou peu importe ce que cela pouvait être.En tout cas, vu le peu de discrétion qu'il semblait avoir, il n'était pas un danger imminent. Mais je préférais ne prendre aucun risque et attendre. Je décidais même de monter avec habilité sur la première branche d'un arbre pour avoir une meilleure vision.

Et je le vis cet homme aussi étrange que surprenant. Mais plus inquiétant, ce dernier était masqué, ce qui n'augurait rien de bon. Surtout que cela me rappela de très mauvais souvenirs. En effet, lorsque des hommes avaient abusé de mon corps, beaucoup avait été masqué pour ne pas qu'on reconnaisse leur identité. Depuis une peur viscérale s'emparait de mon cœur lorsque je voyais quiconque masqué. J'en perdais presque mes moyens, jusqu'à ce que la rage remplaçait cette peur. Je ne savais même pas ce qui me retenait de lui sauter dessus, mais j'attendais. Après tout je ne savais pas s'il était un ennemi ou juste un passant. Drôle de passant, alors qu'il portait un masque...

Alors que j'étais plongé dans mes réflexions, je vis au derniers moment un projectile s'approchait de moi et me rater. Mais j'avais été tout de même la cible de cette attaque. J'avais finalement ma réponse, et je ne pouvais plus douter. Malgré son comportement, que j'aurais qualifié de stupide ou voir débile, au premier abord, je me rendais compte qu'il fallait pas se fier aux apparences. Il jouait un jeu et m'avait découvert, même si je ne savais pas comment. Et puis, il se précipita vers l'arbre ou j'étais postée. Mes muscles se contractèrent est tel un félin, mon corps se préparait à bondir, il n'y avait pas d'autre choix que le combat. Mon esprit commença un compte à rebours... 10,9,8... Il se rapprochait, mais n'était pas encore à porté...7,6...4, Elle pouvait mieux voir les détails de son adversaire. Il était désarmé mais s'avançait avec assurance, me faisant douter qu'il possédait une arme cachée. 3...2... Je manquais de tomber de mon arbre, non pas pour bondir sur l'inconnu mais par surprise.

Je ne savais qualifier ce que je voyais. Mais la plus simple façon de le dire... IL tentait de secouer l'arbre millénaire, comme un enfant essayant de frapper un mur. Le commun des mortels savaient que le tronc ne bougerait pas d'un pouce, mais lui tentait encore et encore... Finalement, il était réellement stupide... A cette pensée, je manquais de rire, mais un sourire se dessina sur mon visage. Ceci n'était plus arrivé depuis, je ne sais combien de temps et je ne m'en rendis pas compte. Cet étranger n'était qu'un attardé... Mais que faisait-il ici? Avait-il été abandonné et donné en pâture aux créatures sauvages. Une victime du destin comme je l'avais été? Je baissais ma garde quelque peu, mais jamais totalement, je bondis avec légèreté au sol, et sorti de ma cachette:

-Que faites-vous ici? Et pourquoi vous en prendre à cet arbre?

Je gardais un ton froid, exprès, mais je ne montrais aucune agressivité envers lui. Je me moquais bien d'être peu vêtue. En effet, depuis que j'étais dans la forêt, je ne portais qu'une sorte de brassière en cuire et une sorte de short  très court et décousu. Mais rien n'enlevait à ma beauté, bien au contraire, je ressemblais à une tigresse. J'avais charmé quelques mercenaires rien qu'en apparaissant. Mais j'avais l'impression d'avoir à faire à un enfant dans un corps d'adulte, ce qui était quelque peu perturbant.

Spoiler:

Tellement d'événements, et tellement de rencontres s'étaient enchaînés ces dernières semaines ! Anay ne pouvait pas prétendre que sa nouvelle vie d'aventurière n'était pas trépidante à souhait ! Elle avait quitté sa petite ferme dès qu'elle avait appris la vérité sur ses parents, et avait eu ce rêve étrange qui n'avait d'autre objectif que de la conduire tout droit jusqu'à sa destinée, et à son initiation où elle fut reconnue mercenaire, Élue par l'Arbre de Vie.

Ambitieuse de faire ses preuves et surtout, de rendre son apparence en adéquation avec sa qualité d'héroïne, elle s'était rendue innocemment dans les Montagnes Célestes où elle avait rencontré un acolyte très spécial, ainsi qu'un couple d'impériaux, desquels ils peinèrent tous les deux à en réchapper.
A son retour dans la capitale, cherchant à revendre ses peaux de lapin et à traquer une créature dans les rues d'Arswalt, elle avait rencontré une autre acolyte, et avait très vite déchanté lorsqu'elle comprit qu'elle n'était pas du tout la seule à avoir été Élue. Enfin, elle avait déambulé dans quelques recoins de la cité, et ses pieds avaient trouvé le chemin de l'arène où elle avait retrouvé l'hurluberlu.

Autant d'animation en si peu de temps, il fallait bien avouer que cela lui changeait du calme serein de sa vie de vachère, et il était grand temps, selon elle, de s'isoler quelque peu. La forêt d'Istralis allait probablement devenir le meilleur endroit pour profiter d'un peu de calme, ainsi que de terrain de jeu pour parfaire ses techniques de guerrière et de chasseresse.
Si son équipement tenait à peu près la route jusqu'à présent, son corps, lui, avait ses limites, et très vite, elle s'était rendue compte que parvenir à tout réunir sur sa liste lui prendrait beaucoup de temps, et d'énergie. Anay s'était alors rabattue sur un choix qui lui semblait logique : économiser, économiser et économiser encore en vue de s'offrir ENFIN un équipement digne de l'héroïne qu'elle était en passe de devenir. Même si ça lui serait douloureux d'esquiver les marchés, et se retenir de tout dépenser pour des broutilles hors de prix ...

Alors, elle avait fait route vers sa chère forêt, armée de ses trois malheureux collets et de son arc de fortune qui faisait piètre allure. Elle était certaine qu'elle ne l'utiliserait plus jamais, mais si jamais elle perdait ses collets, il lui resterait toujours son plan B.
Cela faisait maintenant deux jours qu'elle bivouaquait là-bas, plus profondément au cœur même de la forêt. La solitude elle cherchait, la solitude elle était certaine de trouver si elle s'éloignait de ses précédents campements. Se repérant grâce à la mousse des arbres - une astuce nouvellement acquise au cours d'une conversation très intéressante avec un collègue chasseur -, elle avait marché deux bonnes heures avant de trouver le coin idéal pour se poser. Comme à l'accoutumée, elle avait repéré les lieux, cherché les endroits stratégiques où poser ses pièges et avait été remplir son outre d'eau fraîche tirée d'un courant d'eau aussi mince qu'un filet.

C'est en relevant ses collets et en fourrant les deux peaux de lapin dans sa besace qu'elle remarqua une silhouette passer à quelques foulées de sa position. Une tête blonde qui lui semblait bien familière. Si elle n'avait pas mauvaise vue, elle avait cru bien reconnaître Jade, sa dernière rencontre en date, l'acolyte qui avait pour projet de fonder une guilde, et qui, certaine de la faisabilité de son projet, l'avait déjà invitée cordialement à l'y rejoindre. Une hache sur l'épaule, elle devait être en Istralis pour les mêmes raisons qu'elles : obtenir de précieuses ressources qui se revendraient une fois de retour à Arswalt, dans le quartier commerçant.

Décidée à aller la saluer, et lui proposer, pourquoi pas, de bivouaquer toutes les deux puisqu'il ne faisait nulle doute qu'elle avait son propre campement non loin du sien, Anay se mit en tête de la suivre.
Elle ne cherchait pas à couvrir ses traces, ni à atténuer le bruit de ses pas, mais apparemment, malgré ses enjambées longues et rapides pour rattraper la jeune femme, il semblait bien que cette dernière ne l'entende absolument pas la suivre. Trop plongée dans ses pensées, peut-être ?
Toujours est-il que dès qu'elle la vit se stopper et qu'elle l'entendit s'adresser à quelqu'un, elle pressa de nouveau l'allure, et la rejoignit.

Là, un curieux spectacle l'attendait. Et que des visages connus ! Ca, par exemple, si ce n'était pas une sacrée coïncidence, elle ne s'appelait plus Anay ! Ses yeux se posèrent sur Mélaskholès, enserrant un arbre, une image probablement inhabituelle et curieuse pour les néophytes, mais aussi amusante qu'elle pouvait être, elle n'était pas si étonnante que cela aux yeux de la mercenaire, qui avait déjà assisté à bien pire venant de la part du jeune homme ...

Anay déposa sa main en douceur sur l'épaule de Jade pour lui indiquer la présence dans son dos, et prit la parole.

« Eh bien, eh bien ! » chanta-t-elle d'un air réjoui « En voilà du beau monde ! »

Adieu ma solitude, surtout, j'ai l'impression ...

« Jade », la salua-t-elle d'un sourire et d'un clin d’œil, « c'est une joie de te revoir. Mélas' », enchaîna-t-elle directement en s'adressant à l'acolyte toujours collé à son tronc d'arbre, « comment on se retrouve ?! Je ne m'attendais pas à te revoir si vite depuis notre dernière rencontre. Je suis contente de voir que tu vas bien. Et, je ne crois pas reconnaître Mademoiselle qui t'accompagne ... s'il vous importune, n'y prêtez guère attention : il est dans son propre monde, mais il n'est pas méchant. A moins, bien sûr, que vous le connaissiez déjà, et dans ce cas, faites comme si je n'avais rien dit. »