Remarque:

Sa rune de capture en poche, Anay fit un bout de chemin vers l'ouest en compagnie d'autres Élus qui avaient payés leur place dans une carriole. Tout comme eux, elle désirait se rendre dans les Montagnes Célestes, mais n'avait absolument pas le même objectif que ces aventuriers. Serrés comme des sardines, la blonde dut prendre patience, coincée - pour ne pas dire écrasée - entre un géant ventripotent à la hache à deux mains qui prenait à elle seule deux places, et la pipelette de service, une jeune acolyte bien niaise, qui n'avait que le mot "impérial" en bouche. De toute évidence, le groupe avait pour désir de se frotter à ces félins sauvages mais en ne pouvant s'empêcher d'écouter leur conversation, elle comprit aisément qu'ils n'en avaient jamais tué auparavant. Si Anay esquissa un sourire discret et narquois, personne n'en vit rien.

La charrette fit quelques pauses, mais il était évident qu'elle se rendait au pied des montagnes. Si la mercenaire restait assise dedans, elle devrait leur tenir compagnie durant des jours, faire semblant de les apprécier, sourire à leurs plaisanteries absolument pas drôles et surveiller ses arrières la nuit quand ils viendraient à camper. Quand ils stoppèrent définitivement pour la nuit au premier jour, Anay s'excusa et demanda à ce qu'on poursuive sans elle, prétextant un besoin urgent de se dégourdir les jambes à tout prix. L'acolyte geignit et essaya de l'en dissuader, et c'est très poliment et avec un large et faux sourire que la blonde déclina l'invitation. N'ayant aucune crainte de circuler durant la nuit, elle put enfin se débarrasser d'eux.

Elle mit plus de temps, évidemment, avant d'arriver à bon port mais c'était loin d'être une course, et puis, elle ne comptait absolument pas s'en prendre à des impériaux, alors de ce côté-là, il n'y avait pas de compétition. Elle suivit le chemin que tout le monde semblait emprunter et qu'elle n'avait même pas vu la toute première fois qu'elle avait gravit ces monts, et trouva tout au beau le fameux refuge dont le groupe avait parlé au premier jour de trajet commun. Anay en poussa la porte et fut surprise du monde qu'elle y découvrit : c'est qu'apparemment, le refuge était véritablement un point d'arrêt très prisé. Elle slaloma entre les tables, embrassant la salle d'un regard circulaire sans retrouver les aventuriers de l'autre jour, et s'en alla louer une chambre pour la semaine. Le tenancier était tout un personnage, ce qui la mit instantanément en confiance.

Le confort de la pièce était relatif, mais tout l'essentiel y était. Balançant ses affaires dans un coin, mais déposant délicatement épée et bouclier contre un mur, elle se débarrassa ensuite de sa cape, de ses chausses et de sa coiffe avant de se jeter littéralement sur le lit et de s'y endormir sans même avoir pris le moindre repas.

Cette nuit-là fut dépourvue du moindre rêve, du moindre songe, de la moindre réminiscence d'une vie passée.

Au petit matin, c'est les cheveux emmêlés et ébouriffés qu'Anay se leva tant bien que mal, le jour étant déjà levé depuis un long moment. Totalement dans le brouillard, et avec une sensation désagréable de carton mouillé-séché sur la joue, elle se traîna jusqu'à la salle au rez-de-chaussée où elle demanda à être sustentée dans des borborygmes incompréhensibles pour le commun des mortels, mais audibles pour le tenancier qui lui amena une assiette de viande séchée, pain et fromage, une corbeille de fruit, miel et lait de chèvre. Son estomac, bien heureux, gargouilla une ultime avant d'être contenté.

Quand elle émergea de son coma, elle n'avait pas encore terminé la moitié de ce qu'on lui avait servi, tant la quantité était faramineuse. Le bougre était généreux. Entre temps, la salle s'était un peu rempli, de quoi la surprendre une fois bien réveillée. Distraitement, elle écouta une conversation fort intéressante entre plusieurs individus. Apparemment, on y faisait mention d'une attaque de cergles dans les hauteurs. Anay n'aurait su dire ce qui lui eut pris, mais toutes ses pensées s'orientèrent vers le groupe de jeunes aventuriers partis chasser de l'impérial dans ces mêmes monts. Impossible qu'ils soient déjà rentrés, et ils étaient assez nombreux pour ne pas se laisser tuer si facilement. Elle ignorait pourquoi elle s'en inquiétait, aussi elle les chassa de son esprit avant d'entamer une pomme verte fraîche. L'image d'un pistelle s'imposa à elle, mais en quelques secondes, elle fut effacée pour être remplacée par l'image de la toute jeune acolyte, la pipelette de la bande. Pestant entre ses dents, elle se maudit.

Agrippant épée et bouclier, elle laissa tout en plan pour se mettre en quête de retrouver ces imbéciles, et au moins vérifier qu'ils étaient toujours vivants.
L'escalade fut plus facile que la dernière fois qu'elle avait gravi ces roches escarpées en compagnie de Jade, alors même que cette fois, elle portait à son dos un lourd bouclier et qu'elle avait troqué son épée de bois contre une épée à la lame de cuivre. Il fallait croire que depuis cette dernière aventure avec sa cheffe de guilde, la mercenaire avait parcouru beaucoup de chemin et s'était considérablement améliorée. Il fallait rendre à l'Arbre de la Vie ce qui était à l'Arbre de Vie : tout le mérite en revenait à son mentor Hecktor qui lui dispensait toujours de très précieux conseils. Elle n'en avait pourtant pas toujours été très convaincue, surtout lorsqu'il avait insisté sur l'importance de ses chaussures; mais, lorsqu'elle se fut parée de sa nouvelle paire, la différence fut frappante. Elle avait gagné en vivacité et esquive.

Les montagnes célestes étaient immenses et chercher un groupe dans ces hauteurs sans avoir le moindre indice sur l'endroit où chercher relevait de l'impossible. Mais Anay pouvait au moins apaiser sa conscience en se rendant sur les lieux où on avait repéré cette masse de cergles enragés. Très rapidement, elle reprit le même chemin sinueux qu'elle avait emprunté avec Jade, et s'arrêta quelques minutes sur un premier plateau. Là, elles avaient eu raison d'un seul cergle, moyennant une seule blessure pour la mercenaire. Elle avait été se cacher sous une sorte de préau de pierre pour attirer son attention, et c'était son amie qui en était venu à bout.
Souriant à ce souvenir, elle poursuivit l'escalade. Les roches étaient coupantes comme des lames de rasoir, mais elle savait que plus loin, de redoutables crevasses l'attendaient. Redoublant d'attention, elle les passa sans trop de problème, ni même de déchirures à son pantalon. Quelle joie !
Elle se faufila dans la première crevasse qui menait à un précipice, lieu de trépas du dernier cergle qu'elles avaient occis, avec Jade toujours, quand un cri qu'elle reconnaissait facilement se fit entendre. Même plusieurs. Aussitôt, et avec prudence, Anay se plaqua contre une paroi et pencha sa tête pour gagner en visibilité sans toutefois être vue. Ainsi, elle put jeter un œil sur ce qu'il se passait en avant.

Quatre cergles se battaient entre eux. Peut-être était-ce une danse nuptiale, ou bien un duel de supériorité entre mâles, mais dans tous les cas, il n'y avait pas l'ombre d'un être humain dans le secteur. L'ennui, c'est qu'elle aurait voulu progresser plus avant, et pour ce faire, il fallait qu'elle longe le précipice pour gravir un pan de roche plus accessible. Il lui faudrait vaincre les quatre créatures, c'était obligé.

Spoiler:

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'Combat (facile)' :

Elle n'avait pas trop le choix, il fallait qu'elle passe par là, et donc, qu'elle affronte les quatre cergles qu'elle avait devant elle. Ni une ni deux, elle dégaina son épée et empoigna fermement son bouclier tout en sortant discrètement de la crevasse. S'approchant à pas de velours, elle voulut rester le plus longtemps discrète afin de ne les surprendre qu'au tout dernier moment. Ce ne fut pas bien compliqué, trop pris qu'ils étaient par leur duel.

Quand il lui sembla être suffisamment proche d'eux, elle accéléra l'allure et courut dans leur direction, bouclier en avant, et rentra dans le lard d'un premier cergle, abattant son épée sur sa tête et le tuant sur le coup dans un grand éclat de sang.
Les autres cergles sauvages furent pantois l'espace d'un instant, le temps de comprendre qu'ils étaient attaqués par un humain, et se tournèrent vers la mercenaire. Leurs griffes acérées étaient déjà bien aiguisées des précédentes luttes, et ils se mirent à l'attaque l'un après l'autre. Cachée derrière son égide, elle reçut malgré tout quelques égratignures.

Bien heureuse était-elle d'avoir suivi à la lettre les conseils d'Heckor concernant les tenues qu'elle se devait de porter. Sa cape, faite d'une épaisse peau de lapin et aux décorations magiques, absorbait une bonne partie des dégâts si bien que sa propre peau était mieux protégée des plaies de ce type.
Anay échangea un regard avec ces créatures désormais furieuses, et comprit qu'il ne lui serait pas si aisé que cela de les vaincre. Mais, si par un coup du sort incroyable elle y parvenait, alors il n'y avait vraiment plus grand chose qu'elle se devait encore de craindre.

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