Toujours silencieux, Alarick et Amorine quittèrent la forêt d’Istralis alors que le soleil rayonnait encore de ses lueurs oranges. Ils récupérèrent leur chevaux qu’ils avaient laissé en pâture – Amorine avait une magnifique jument blanche qu’elle montait à cru, elle était sa compagne depuis des années et lui obéissait au doigt et à l’œil, elle pouvait donc la laisser libre sans crainte de la perdre, Alarick se demandait si l’animal n’avait pas un peu de sang de licorne… Quant à lui il s’était dégoté un jeune hongre baie qui malgré sa castration s’était entiché de la magnifique jument et ne la quittait pas d’une semelle – pour cet indice encore, Alarick était quasi persuadé que la jument était coupée de licorne... Le jeune élu harnacha ses peaux de lapins sur le croupe de son cheval et Amorine fit de même avec les deux sacs de viande séchées sur sa jument.

Ils se mirent en route sans dire un mot, prenant la route de retour pour Arswalt - plein ouest - et eurent donc le soleil dans le dos ce qui n’était pas pour déplaire à Alarick qui ne supportait pas l’avoir en pleine figure… Les chevaux se mirent spontanément au petit trot et Alarick s’amusait de voir son cheval adopter une allure juste suffisante pour être un peu en avant de la jument blanche, à côté d’elle, lui affiliant un comportement des plus humains : il aurait juré que son hongre draguait la jument…

Il échangea un regard amusé avec Amorine qui répondit à son sourire sans en comprendre réellement l’origine. Alarick semblait content et apaisé, c’était tout ce qui comptait pour elle… Elle s’était vraiment attachée à ce jeune homme complexe et mystérieux. Elle qui n’avait pas eut d’enfant – et n’aurait jamais vu son âge – s’était prise d’une affection maternelle pour lui. Etrangement, c’était la première fois qu’elle avait ce sentiment alors qu’Alarick n’était pas son premier protéger. Mais il était le seul à avoir autant besoin d’elle à ses côtés et elle était intimement persuadée qu’il serait son dernier…

Tout à ses rêvasseries, elle sursauta lorsqu’Alarick se mit à parler soudainement, et d’une voix forte.

- Mais c’est Iain ! Hey ! IAIN ! SALUT ! il agitait son bras vers une silhouette au loin

Amorine dut plisser les yeux pour bien voir mais c’était un fait : elle aussi reconnu le jeune mage et pressa donc sa jument pour qu’elle suive le hongre d’Alarick qu’il avait lancé au petit galop pour rejoindre Iain à quelques dizaine de mètres d’eux.

C’est tout sourire qu’Alarick arrêta sa monture pile devant le jeune mage. Son arc en bandoulière avait un peu glissé, aussi le remit-il en place.

- Bah, on a vadrouillé de-ci de-là ! fit-il souriant encore plus J’ai de la chance de vite cicatriser, heureusement, pour un archer ça aurait été une belle merde si je ne pouvais plus me servir de mon bras ! il descendit de sa monture et prit les rênes en main Tiens d’ailleurs, t’as vu ce que j’ai fait ! Je m’y suis exercé des jours durant mais c’est bon, je l’ai bien en main à présent ! retirant son arc de son torse, il le tandis à Iain Bon, seulement contre des lapins pour le moment. ajouta-t-il sans honte ni lâcher son sourire

A côté, Amorine avait-elle aussi mis pied à terre et s’était approchée de Dahn, riant sous cape de le voir tout timide et rougissant. En effet, elle avait bien reçut sa lettre, mais n’avait pas pris le temps d’y répondre. Parce qu’elle riait trop à chaque fois qu’elle la relisait pour tenter de lui écrire en retour.

Ses mots était d’une subtilité sans égales, mais Amorine n’était pas dupe. Il transpirait pour elle d’une passion luxurieuse, et « à leur âge » comme il avait dit, il était fort agréable d’être désiré de la sorte… Riant toujours sous cape, elle fit tomber la capuche de sa houppelande et chercha le regard de Dahn.

- Oui, j’ai bien reçu votre lettre. répondit-elle en réprimant son rire Je dois avouer que je ne m’attendais pas à recevoir pareille missive, vous m’avez prise de court, pardonnez-moi de ne pas vous avoir répondu. poursuivit-elle Mais, je dois avouer que cela m’a fait plaisir. A nos âges, comme vous le dites, il devient rare de recevoir pareil courrier, je ne devais pas avoir plus de trente-cinq ans lorsque j’ai reçu le dernier ! cette fois elle ne garda pas son rire Il est plaisant de se croiser de nouveau, ainsi nous pourrons faire plus ample connaissance…

Un sourire franc étira ses lèvres mais il ne débordait pas du tout de la passion flamboyante de Dahn. Non, Amorine n’était pas du genre à fondre aux premiers mots doux, même si elle était plus proche de la tombe que de sa jeunesse, elle ne se laisserait pas avoir comme ça… Dahn allait devoir redoubler de subtilités et de faveurs s’il voulait recevoir celles de l’enchanteresse.