Toute l'eau d'un gigantesque seau arriva sur le visage d'Anay, trempant l'entièreté de ses vêtements. La froideur de l'eau glacée la réveilla en sursaut, et elle poussa un cri strident sous la sensation désagréable d'avoir ses frusques puantes collées à sa peau. Dégoulinante, les idées pas claires et la tête littéralement dans le brouillard, la mercenaire regarda tout autour d'elle. Elle ne reconnaissait rien à l'endroit, et n'avait même pas le souvenir d'être arrivée jusqu'ici avant de s'effondrer. Elle était allongée dans de la paille, et selon toute vraisemblance, elle avait passé la nuit dans une étable. Elle leva les yeux et découvrit devant elle l'air sévère et mécontent de son mentor qui la toisait du noir de ses yeux et de ses iris rouges.

« Mais tu es fou, ma parole, Hecktor ?! » s'énerva-t-elle, dérangée par ce réveil brutal, « Je vais attraper la mort ! »

- Dehors. Maintenant, tonna-t-il en jetant avec violence le seau qu'il tenait encore.

Il se dirigea vers la sortie de l'étable d'un pas si lourd qu'Anay n'osa même pas broncher et préféra obéir bien sagement. Sa première tentative pour se relever fut soldée par un échec, sa tête lui tournoyant bien de trop. Sa bouche était pâteuse, et son front douloureux. Il lui semblait bien que les événements de la veille aient totalement échappé à ses souvenirs car impossible pour elle de se rappeler de quoi que ce soit. La deuxième tentative fut la bonne, mais surtout, celle qui fut accompagnée de puissantes nausées. Elle expérimentait pour la toute première fois une gueule de bois phénoménale. Maudit avait été ce Iain d'avoir réussi à la faire boire ! Aujourd'hui matin, elle en payait le prix.
Titubante, Anay se traina jusqu'à la sortie où un soleil aveuglant lui vrilla la tête et brûla ses yeux. Dehors se tenait Hecktor, qui l'avait attendue, et à sa posture autant qu'à son faciès, il ne fallait pas être un génie pour comprendre qu'il était passablement en colère.

- Tu devrais avoir honte de toi, l'accueillit-il toujours avec mauvaise humeur. Une Élue de ta trempe, t'abaisser à l'ivresse de la boisson ...

« Ca va ... c'est pas pour une fois, Hecktor. »

- Je t'avais dit que l'alcool endort les sens. Regarde-toi. Tu n'es qu'une loque.

« Qu'est-ce que tu racontes ? A part quelques nausées et un mal de tête, je suis parfaitement capable de combattre en l'état actuel ! »

- Ah vraiment ? Parfait. Prouve-le moi, déclara-t-il en jetant à la mercenaire son épée et bouclier tout neufs.

Évidemment, absolument pas prête, Anay laissa tomber les armes au sol, n'ayant pas pu les rattraper au vol. Craignant que son mentor profite de l'occasion pour foncer sur elle et l'attaquer - ce dont il aurait été clairement capable - elle se dépêcha de les ramasser maladroitement.
Mais son mentor n'en fit rien, à vrai dire, il était déjà parti dans la direction opposée à vive allure, toujours aussi énervé. Armes en main, elle accourut pour le rattraper, et quand elle fut plus ou moins à sa mesure, elle réalisa qu'il était vraiment furibond, à maugréer dans sa barbe.

- ...dire que j'lui accorde du temps pour l'entraîner ...pff ... sale petite ingrate ... boire un jour de semaine ... honteux... vraiment honteux ...

C'est en calculant quelques mots très durs qu'elle réalisa enfin de sa conduite. Elle l'avait déçu alors même qu'il avait sa propre lutte à mener contre le Fléau. Peu importait le lieu où il l'emmenait, ou ce qu'il allait lui demander de faire, elle ferait de son mieux pour ne pas aggraver son cas. Même si actuellement, ses capacités en était bien diminuées ...

Anay suivit son mentor longuement. Son épée et son bouclier ne lui avaient jamais semblé aussi lourds, ce qui n'était pas normal. Alors c'était ça, les effets de l'alcool dont Hecktor voulait la prémunir ? Pas étonnant qu'il était si en rogne que cela, et qu'il lui ait vivement déconseillé, autrefois, de boire. Ce n'avait été qu'un malencontreux verre ... qui s'était prolongé et succédé par un autre, puis un autre, puis un autre, puis ... Elle n'avait jamais imaginé qu'elle allait terminer dans un tel état. On ne l'y reprendrait plus, c'était certain.

« Où m'emmènes-tu donc ? » se risqua-t-elle à demander, chaque pas qu'elle faisait étant un pas beaucoup plus douloureux qu'il n'aurait du être.

Pour toute réponse, Hecktor grogna en haussant les épaules. Il ne voulait pas lui parler pour l'instant, encore beaucoup trop énervé. Ils continuèrent alors de marcher sur ce qui sembla à la mercenaire être des kilomètres, au moins !
Quand enfin il s'arrêta net, ils avaient traversé les campagnes arswaltiennes et devaient être à quelques heures au moins du Mur. Anay, n'en pouvant plus, soupira longuement de soulagement, se laissant choir au sol, ne pouvant plus supporter le poids qu'elle trainait depuis un moment.

- Eh beh. Quelle fière allure tu as, Élue ... , railla-t-il en insistant sur ce dernier mot. Puisque tu es certaine d'être suffisamment en forme, malgré ta gueule de bois, tu vas me le prouver. Il désigna de l'index un attroupement un peu plus loin, composé de cerbères - assurément - et de ces loups noirs qu'elle avait déjà eu l'occasion d'affronter avec quelques membres de l'Union.

Anay grimaça tout en sifflant. Des cerbères. Même si elle ne partageait pas nécessairement le dégoût de Iain vis à vis de ces créatures, elle devait bien admettre que leur explosion au moment de leur trépas était bien ennuyeux. Et quant à ces loups noirs, elle savait d'expérience que leurs dents et leurs mâchoires étaient larges et puissantes. Elle savait où voulait en venir son mentor : combattre précisément ces bêtes - et s'en sortir indemne - nécessitait une agilité certaine, et un bon temps de réaction. Ce qu'elle n'était pas certaine d'avoir présentement ... Mais plutôt mourir que d'admettre qu'Hecktor avait raison sur toute la ligne !

- Tu prends ton p'tit bouclier, ta p'tite épée et tu vas me dézinguer tout ça. Moi, je te regarde, déclara-t-il avec un sourire satisfait aux lèvres.

Le sadique. Anay savait qu'il savait qu'elle allait passer un mauvais quart d'heure. Et elle était même persuadée qu'il savait qu'elle savait qu'il savait tout ça. S'ensuivit un échange de regard, une lutte acharnée pour savoir qui allait ployer avant l'autre. Mais comme elle l'avait déjà décidé : plutôt mourir que de lui donner raison.
Rassemblant toutes ses forces, elle empoigna le manche de son épée nouvelle, et s'arma de son grand bouclier d'acier avant de se remettre debout. De sa démarche assurément altière, elle passa devant lui sans lui apporter le moindre regard et marcha droit vers le groupe de bêtes corrompues.
Chaque pas qu'elle faisait, chaque impulsion faisait vibrer ses muscles et remontait tout le long de son corps pour meurtrir davantage sa tête déjà douloureuse. Mais en contractant ses mâchoires, pensa-t-elle, cela allait le faire. Il le fallait de toutes façons...

Spoiler:

Le membre 'Anay Ganiwen' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

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#1 'Combat (facile)' :


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#2 'Combat (facile)' :

Compte tenu de son énergie et de ses forces et réflexes amenuisés, Anay savait que le combat n'allait pas aussi bien se passer que lorsqu'elle était épaulée par les membres de sa guilde. Et à dire vrai, il y avait bien longtemps qu'elle ne s'était plus battue seule. Ses jambes étaient toujours aussi lourdes et soulever épée et bouclier lui nécessitait beaucoup de volonté. Autrement dit, il était plus intelligent de se débarrasser dans un premier temps des cerbères. Leurs flammes pouvaient être vraiment pénibles et l'handicaper par la suite, alors charger dans leur direction pour les tuer sur le coup, et ensuite faire preuve d'autant de vivacité que possible pour parer de son bouclier d'acier les explosions, était selon elle le plan idéal. Pour les shunkahas, elle improviserait. Comme toujours.

Accélérant la cadence, elle se mit au trot, puis au pas de course dans leur direction. Quand elle ne fut plus qu'à quelques mètres, elle poussa un cri qu'elle voulait intimidateur, mais qui n'était en réalité que le reflet de sa propre douleur, et de son déploiement considérable d'énergie. Elle repoussa un premier cerbère qui rencontra lourdement son bouclier. Retourné sur le dos, elle n'attendit pas pour abattre sa lourde épée sur son poitrail, le transperçant. Son compère bondissait déjà et, si d'un miracle, Anay ne pivotait pas pour parer de son égide, les crocs de la bête enflammée se plantaient dans son épaule. Le métal rugit à l'impact, puis repoussa, et là encore, le fil de l'épée trancha la peau recouverte de magma. De ses toutes dernières forces, elle tourna le dos aux cadavres des cerbères et s'accroupit, cachée par sa plaque : ainsi, elle se parait des déflagrations à venir.

C'était sans compter les loups noirs qui ne voulurent pas attendre gentiment leur tour, bien évidemment. Les trois bondirent également, et la mercenaire fut alors confrontée à un dilemme : se prémunir des flammes destructrices des cerbères, ou éviter les attaques imminentes des shunkahas. Mais estimant qu'elle n'allait pas avoir de réflexe assez rapide pour changer de position, elle garder sa position actuelle le temps d'être frappée par les explosions, et protégea son corps de son épée, qu'elle plaça devant elle, à l'horizontale, espérant qu'ils se blesseraient déjà à la réception.
Tout s'enchaina alors très vite : les flammes léchèrent l'acier sans l'endommager, un des loups noirs la déstabilisa et la fit tomber sur ses fesses. La seconde déflagration lui brûla le bras droit, lui arracha un cri de douleur tandis que les shunkahas s'en prirent à elle, plantant griffes et dents acérées dans sa chair. Du mieux qu'elle put, elle se débattit, se libérant du poids de son bouclier pour faire tournoyer maladroitement et de manière chaotique son épée, espérant que cela parvienne à décourager les fauves.

Devaient-ils être affamés car à aucun moment ils ne la laissèrent en paix, grognant et bavant sur elle, les mâchoires claquement brutalement. Elle eut beau les repousser de sa lame, ces saletés étaient aussi agiles et malins comme des tarzblancs. Là, Anay réalisa qu'elle était dans un pétrin comme jamais encore auparavant. Il lui était arrivé, bien sûr, d'être en très mauvaise situation, comme la fois où elle avait décidé d'affronter des cergles dans les montagnes célestes, toute seule. Mais, cela avait été différent. Les cergles, bien qu'hostiles, n'étaient pas carnivores, et à l'époque, ils n'avaient fait que défendre leur nid, et leurs oeufs. Les shunkahas, c'était une toute autre paire de manche. Ils en voulaient véritablement à sa vie. Si elle succombait, elle deviendrait de la pâtée pour loups hétérochromatiques. Aujourd'hui, elle était seule. Iain n'allait pas la sortir de là de ses puissantes boules de feu, ou Arthur n'allait pas intervenir pour charger dans le tas et les propulser au loin d'un coup d'épaule, ou encore, Jade n'allait pas venir auprès d'elle, aux petits soins, pour apaiser ses douleurs. Elle était véritablement seule. Et à deux doigts de mourir. Alors, une vague de panique s'insinua en elle pour la première fois.

« Hecktoooor !! » hurla-t-elle en se débattant toujours.

- Un problème, gamine ? répondit-il, pas très loin, d'un ton enjoué et faussement innocent.

« Aide-moi, je t'en prie !! »

- Pourquoi ? Tu disais être en pleine possession de tes moyens ... tu devrais être capable de te sortir de ce guêpier, non ?

« Bon Arbre de Vie ! Hecktor ! Tu veux que je crève ou quoi ?! C'est bon, très bien ! Très bien ! Tu as raison ! Je m'excuse, je n'aurais pas du boire !! Maintenant, aide-moi ! »

Mais son mentor était toujours à proximité, bras croisés, à observer la scène d'un sourire sadique. Avait-elle vu juste ? Cherchait-il vraiment à la tuer ? L'avait-on payer pour se débarrasser d'elle ? Non, impossible, Hecktor n'était pas quelqu'un d'aisément corruptible. A moins qu'il soit devenu fou ? Ils avaient, après tout, eu un échange très étrange il y avait plusieurs mois, où il lui avait expliqué qu'en définitive, tout ce que les Élus faisaient ne servaient à rien. A l'époque, elle l'avait senti las de perdre ses compagnons les uns après les autres. Peut-être qu'il était au bout du rouleau et qu'il avait perdu la raison, se lançant dans une folie meurtrière...

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